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URRRAAAAA

Phonétique

[oúrrraaaaā]

CEALERA, C. ; UNGUREANU, O. ; CIUBOTARU, A. ; BUTURUGA, Ş. ; BUTURUGĂ, B. (2022), Istorii pontice în benzi desenate. Tomis, Constanța : Muzeul de Istorie Națională şi Arheologie, page 23, planche 1, registre 2, case 1.

Comment citer cette fiche

BARLEA, R. , (14 avril 2025), "URRRAAAAA", in OTPS, onomatopées traduction plurilingue surbmorphologie, CAER, Aix-Marseille Université : en ligne :https://otps.univ-amu.fr/onomatopees/urrraaaaa/

Rédaction

Roxana BARLEA

Autres rédacteurs

    • Modifié le : 14/04/2025 à 13:08
      par : Sophie Saffi
      Rédacteur/trice : Roxana BARLEA

    Onomatopée de cris d’enthousiasme du public

    Variations de structures

    Onomatopée simple. Cependant, dans la même case, l’item est répété 2 fois, avec la lettre r répétée 3 fois et la lettre a répétée 5 fois, respectivement 6 fois.

    URRRAAAAA [oúrrraaaaā], URRRAAAAAA [oúrrraaaaaā].

    On distingue à deux endroits différents dans la même case le même type de cri de la foule mais il ne s’agit pas d’une onomatopée double, il s’agit de deux événements distincts.

    Equivalents dans OTPS

    Equivalents

    Etymologie

    L’item Urrraaa est une interjection proprement-dite, produite par les cordes vocales humaines pour exprimer l’enthousiasme, la joie, l’approbation, l’adhésion (DLR, s.v.). Les dictionnaires roumains généraux enregistrent des variantes phonétiques dans des formes simples, répétées trois fois (ura, ura, ura) ou des formes avec une consonne aspirée hura, urah, cf. aussi hirah, (DLR s.v.). Ces variantes, mais aussi la forme standardisée en roumaine (sans l’aspiration de a), peuvent apparaître en plusieurs versions avec la multiplication de chacune des lettres qui les composent : uuura ; urrra; uraaa, etc.
    Sa relation avec les autres classes grammaticales est intéressante. Outre l’habituelle nominalisation par conversion (« … se auzi un « ura », 1938, cf. DLR s.v. fr. « on entendit un « hourra »), les dictionnaires notent le subst. urale, un plurale tantum, explicable par l’émission très souvent collective de l’interjection (v. aussi notre cas dans cette BD).
    Pour le verbe, l’habituel dérivé au suffixe infinitival (-a etc.) #a ura n’a pas pu être créé, pour deux raisons : 1. L’item se termine déjà en -a ; 2. Il existe déjà en roumain le verbe a ura « a adresa urări cuiva », fr. souhaiter ( français > russe.
    Pour une reconstruction diachronique approfondie, on notera que les dictionnaires étymologiques des langues-sources offrent d’innombrables variantes, qui situent les premières attestations dans les aires ethnolinguistiques les plus diverses du monde. Évidemment, ce que nous recherchons, c’est éventuellement un verbe avec une sémantisme justifiant la structure interjectionnelle en question.
    Le dictionnaire étimologique russe renvoie à kera! De l’Asie Centrale (XIVe siècle) ou au turco-tatare urra < wurmakc, fr. « frapper » (Vasmer, DER, s.v.). Les lexicographes allemands renvoient à la l’impératif hurra du verbe hurtig de l’ancien moyen allemand, qui doit être mis en relation avec angl. to hurry fr. « se dépêcher » (Kluge, EDDS, s.v.). Enfin, Le Trésor de la Langue Française répertorie diverses attestations similaires anciennes en tatare-cosaque, turque, russe, allemand et surtout en anglais. Le verbe attesté dans la plupart des sources semble être tu huze fr. « hisser », dont le dérivé heisau représentait le cri des marins quand ils hissaient les voiles. Un autre anglicisme invoqué est huzza(i), attesté en 1573, devenu le salut des marins. Avec les altérations facilement explicables par sa circulation dans le temps et dans des aires linguistiques vastes, ce terme s’est répandu en tant qu’élément commun du vocabulaire de la marine, ensuite militaire, en général.

    Submorphologie

    Comme toute structure interjectionnelle qui rend les sons des cordes vocales humaines pour exprimer un état d’esprit (dans ce cas), le phonétisme de cet item est dominé par des voyelles.
    L’accent tombe sur u [ou] initial, qui constitue tout seul une syllabe.
    Le muscle lingual est en position postpalatale et les lèvres sont en fermeture maximale, sans toutefois se toucher. Il en résulte une voyelle fermée, partant d’un point assez profond. Il s’agit évidemment d’un son clair, grave, celui des décisions fermes.
    Une constrictive vibrante [r], c’est-à-dire une sonante liquide dentale sonore, produite par le contact de la langue avec les alvéoles des dents supérieures, assure l’amplification de la résonance de l’air émis en prononçant la voyelle qui la précède. Ce n’est pas par hasard qu’en roumain de nombreuses onomatopées qui renvoient à des signaux sonores contiennent le [r] dans leur structure (v. bâr, mâr, sfâr, zbâr, etc.).
    Ici c’est la consonne qui occupe, du point de vue de la forme, la position centrale dans la structure du lexème, mais, comme on ne peut pas mettre l’accent là-dessus, elle joue son rôle d’amplificateur des résonances vocaliques, en se détachant, par une deuxième ouverture de la bouche, de la voyelle initiale, à qui elle reprend le souffle, et en format une syllabe avec la deuxième voyelle.
    Enfin, [a], la voyelle finale, se situe, par rapport à u [ou], vers l’autre extrême vocalique, celle des sonorités sans limites physiologiques-fonctionnelles. Première de la série des centrales et seule de la série ouverte, elle est le résultat du geste de descendre la langue au fond de la bouche (après l’effort de prononciation de la consonne vibrante [r]), permettant l’ouverture maximale de l’espace buccal et donc l’évacuation complète du flux d’air.
    De l’espace semi-fermé et limité de [ou] à l’espace ouvert et ample de [a], après avoir franchi le seuil de [r], toute la construction phonétique rend ce que ce lexème s’est approprié par son long usage : l’explosion d’enthousiasme et de détermination partie de l’intérieur et manifestée à l’extérieur sur toutes les dimensions – vers l’avant, pour un impact sur les récepteurs ; latéralement, vers la solidarité avec les camarades, vers le haut, comme un signe de liberté totale.
    Par son ancienneté, son polysémantisme et son pouvoir de circulation dans des aires linguistiques larges et diverses, [oúra] semble l’un des lexèmes les plus standardisés au monde.
    Notons que les systèmes phonologiques des différentes langues ajoutent diverses modulations à ces trois sons. Nous rappelons que la présence des deux h (initial et final) dans le symbolisme graphique de diverses langues et époques atteste des formes aspirées, etc. En roumain et dans d’autres langues, le u [ou] initial, en tant que voyelle pleine, est parfois précédé dans la prononciation par une semi-voyelle que le système orthographique ne note pas [ŭura].
    La possibilité de multiplication de chacun des trois sons essentiels représente la tendance à hyperboliser une structure qui rend l’amplitude déjà par sa nature.

    Pour en savoir plus

    Commentaires et spécifités